Bienvenue dans l’ère de la monnaie fantôme.

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Par James Howard Kunstler – Kunstler.com  

Voici un article qui dépeint assez explicitement la situation actuelle. L’auteur rejoint la thèse de Jancovici selon laquelle la crise est la résultante du stress énergétique auquel nous sommes confrontés.

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Il va sans dire que nous aurions tous dû commencer à nous inquiéter bien plus tôt que la semaine dernière des fraudes qui, depuis maintenant une quinzaine d’années, sont inhérentes au mode de fonctionnement de notre système bancaire. Les choses ne sont plus ce qu’elles paraissent. Les intérêts composés ne semblent plus vraiment fonctionner depuis 2008 et ce, parce que le monde ne peut plus augmenter suffisamment sa production d’énergie pour générer le surplus de richesse dont il aurait besoin pour couvrir les intérêts qui sont dus.

Ce qu’il nous reste aujourd’hui n’est plus qu’un jeu de chaises musicales, de schémas de Ponzi, de fraudes, de ruses, de complots, d’arnaques, de bluffs, de subterfuges, de quantitative easing, de prétendus et d’une infinité d’autres moyens de déguiser la réalité. Le fait est qu’il n’existe plus suffisamment de richesses, et certainement pas suffisamment pour couvrir la toile d’obligations que nous appelons ‘monnaie’. A chaque fois que quelqu’un, qu’une société ou qu’un gouvernement se voit demander de s’adapter ou de se taire, nous risquons de voir se désintégrer cette toile, puisque comme nous le savons tous, tous ses participants sont dans le rouge. Vous voulez ‘votre’ argent ? Attendez trois jours. En fait, attendez plutôt quatre jours. Oh non pardon, disons la semaine prochaine. Et que penseriez-vous dans deux mois ? Vous savez quoi ? Oubliez ça… Il n’est pas surprenant que tout le monde s’inquiète.

La situation est clairement en train d’échapper à tout contrôle. C’est pourquoi ce qui arrive aux citoyens de la pauvre petite crypto-nation qu’est Chypre a remonté tout le monde. Chypre a cessé de faire semblant. Ses banques sont cuites. Son gouvernement ne peut plus prendre soin de lui-même. Chypre est trop pauvre pour être une économie moderne. Elle a échoué dans son rôle de lavomatique monétaire pour les brigands de Russie et les trafiquants de drogues de Méditerranée. Les touristes et les retraités feraient bien de faire leurs valises et de partir dès que possible parce qu’ils n’auront bientôt plus accès à l’argent dont ils auront besoin pour survivre chaque jour.

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Les termes du plan de sauvetage annoncé dimanche dernier sont pour le moins curieux. Selon le New York Times, ‘le contrat laisserait de côté l’idée très controversée d’imposer une taxe sur les dépôts bancaires mais impliquerait toutefois des pertes pour les déposants et les possesseurs d’obligations’. Dit qui ? A dire vrai, il n’y a aucune différence entre la fameuse ‘taxe’ et l’imposition de ‘pertes’. Ce n’est qu’une question de sémantique. Le mot ‘taxe’ a été oublié il y a deux semaines après que l’Union Européenne ait proposé au gouvernement Chypriote de plumer ses déposants. Cette proposition n’a bien entendu pas été bien accueillie, c’est pourquoi on n’entend plus parler aujourd’hui que de levées sur les comptes épargne de plus de 100.000 euros et de pertes pour les détenteurs d’obligations bancaires. Quant aux dépôts bancaires de moins de 100.000 euros… vous pouvez les récupérer, le piège étant bien entendu que les banques sont actuellement fermées… Et l’argent de l’Union Européenne n’atteindra certainement pas les côtes de Chypre avant mai. Peut-être l’Union l’envoie-t-il par voilier dans l’espoir que le vent soit bon.

Chypre est encore sur le point de devenir la pupille de quelqu’un. Elle a été celle de la Turquie et de la Grande-Bretagne au cours de ces 400 dernières années. Sa population est composée de 60% de Grecs et de 40% de Turcs, ce qui rend sa gouvernance chroniquement inconfortable. L’île demeure divisée en deux régions hostiles, et si vous l’observez sur une carte, vous vous rendrez vite compte qu’elle est bien loin de la Grèce et plutôt cachée sous le ventre de la Turquie. Elle est un centre naval stratégique en raison de sa proximité avec le Proche-Orient et est occupée à la fois par des troupes de l’OTAN et des militaires Britanniques – ce qui est assez pratique, compte tenu de la situation au Proche-Orient qui se dégrade à mesure que les nations s’effondrent et menacent les réserves mondiales de pétrole. Je suppose que la Turquie reprendra un jour en main l’administration de Chypre en raison de sa proximité géographique avec l’île. On prétend que Chypre possède des réserves de gaz offshore considérables, mais que la politique y soit si problématique qu’une grande partie de ces réserves puisse ne jamais être récupérée sur le plan logistique, particulièrement tant que le reste du Proche-Orient sera en flammes.

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Le plan de sauvetage actuel, avec ses confiscations et ses décotes, est le premier de son genre. Jamais, depuis le début du mélodrame Européen, n’avions-nous entendu parler de l’idée du vol de propriété privée des citoyens d’un pays membre par les autorités. C’est pourquoi cette notion s’est réverbérée instantanément à travers l’Europe. Pourquoi la même chose ne pourrait-elle pas se produire en Italie, en Espagne, au Portugal, en Irlande ou en Grèce ? Et certains se sont même demandés tout haut si le gouvernement des Etats-Unis ne pourrait pas se lancer dans un projet similaire, en forçant par exemple les retraités à placer leur argent sur des instruments du Trésor.

N’oublions pas non plus que l’argent puisse ne plus être là. Qu’il n’en existe plus nulle part. Les banques sont insolvables. Elles se sont débarrassées de leurs réserves pour obtenir du papier – comme toute autre entreprise autour du monde – et il se trouverait maintenant que leur collatéral ne soit qu’une mauvaise blague. Les déposants des banques de Chypre pourraient bel et bien perdre leur argent, mais l’Union Européenne ne collecterait rien. Et voilà un autre plan de sauvetage qui ne s’avèrerait être rien de plus qu’une fanfaronnade. Le fait est qu’il soit peut-être impossible de saisir de l’argent dans quelque banque Européenne que ce soit, parce que plus aucune d’entre elle n’en possède encore. Peut-être le fiasco de Chypre a-t-il poussé certains à reconnaître la banqueroute totale du système.

Toute cette mascarade est bien loin d’être terminée. Nous assisterons à bien d’autres paniques bancaires, qui pourraient ou non se traduire par des files de déposants faisant la queue devant les jolis bâtiments de villes Européennes à mesure que les arbres des grandes avenues commenceront à bourgeonner. Alors que commenceront les activités post-Chypre, du capital pourrait tout simplement fuir l’Europe vers les griffes de Jamie Dimon et autres faiseurs de miracles.

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Toutes les discussions autour de la crise ont oublié de prendre en considération les forces des ténèbres qui se déplacent dans l’univers parallèle du racket que sont les produits dérivés – qui devraient suffire à faire exploser ce qu’il reste de légitimité financière malgré les excuses et stratégies que trouveront encore les gouvernements et les banques centrales. Ceux qui dirigent le monde devront accepter l’idée que personne ne peut couvrir ses pertes, et que ces pertes continueront de grimper à chaque fois qu’une banque centrale appuiera sur un bouton.

 Bienvenue dans l’ère de la monnaie fantôme.

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